Sujet: Et si on jouait nos revoyures ? 09.03.18 22:07
ft. Tom Perrin
“Et toutes ces années, ne sont-elles qu'un miroir déformant, ou changent-elles vraiment les choses”
Et si on jouait nos revoyures ?
Il avait fini par accepter la sortie au théâtre malgré plusieurs urgences à régler : la comédie n’était pas ce qu’il préférait, mais le nom de Perrin lui disait quelque chose. Le scientifique en lui savait pertinemment que cela était une simple coïncidence. La pièce était jouée en milieu de soirée et, après le dîner raté du nouvel an, cela représentait une excellente occasion, vue sous un angle particulièrement complexe à trouver, de partager du temps avec certains collègues.
L’aéroport à l’arrivée à Paris sembla immense au petit Aleksander, mais il lui préféra nettement celui de départ, c’est-à-dire, de Mombassa qui avait un air plus familial. Pourtant, attrapant la main de sa tante, il la suivi sans aucune peur vers la gare la plus proche pour rejoindre Nancy où elle avait des amis de longues dates.
Aleksander était entouré de gens dont il ne comprenait pas la langue, pendant que sa tante, s’exprimant dans un français sans fausse note, discutait au téléphone. Il entreprit alors de ramasser de multiples fleurs qui trainaient sur les bas-côtés de la route pour l’herbier de celle-ci. Quelques minutes plus tard, une voiture bien trop neuve au goût du petit Aleksander – il faut dire que celle de son père paraissait déjà trop neuve à Mombassa – récupéra le petit duo pour les amener à leur destination. Ils arrivèrent dans une famille avec laquelle sa tante semblait bien s’entendre, mais dont les paroles coulaient comme une mauvaise chanson dans les oreilles du petit Aleksander.
Le français, il n’y comprenait fichtrement rien, pourtant, quand il fallut partir, trois jours plus tard, il fut plutôt triste de devoir abandonner deux nouvelles amies.
[Environ vingt ans plus tôt]
Il y a des promesses dans chaque aéroport, même si au fur et à mesure, le lieu avait perdu son charme. Néanmoins, remettre les pieds en France, pour Aleksander, regorgé d’une magie dont le centre était à Nancy. Il y avait désormais assez de français dans son cerveau pour pouvoir raconter ses histoires à ses amis les Perrin. Les deux plus petits étaient son meilleur auditora, et il appréciait vraiment les rares visites qu’il donnait encore avec sa tante. Avec le temps, il s’était créé des liens quelques peu particuliers entre lui et ses quatre amis, comme seule une amitié de longue distance pouvait en faire. Mais cela n’aurait pas permis à Aleksander de comprendre la véritable particularité de ce jour : c’était le dernier. Entre sa vie à lui qui aller décoller, et sa tante qui perdrait contact avec les Perrin, l’ « au revoir » de ce soir aurait un goût caché d’ « adieu ».
Quand le rideau se ferma, après la dernière ovation, le cerveau d’Aleksander perdit son moindre doute. Le petit Thomas avait bien grandi en vingt ans, mais il ressemblait encore tellement à cette ancienne petite bouille qui avait écouté ses histoires avec passion il y a tant d’années ; dans les traits, se mélangeaient aussi, parfaitement reconnaissables, ceux de son père, de sa mère ou encore de ses sœurs.
- Vous n’avez qu’à partir sans moi, je prendrais un taxi de mon côté, mais j’apprécierais visiter rapidement la troupe. Nous nous verrons demain, dans tous les cas !
[…]
- Excusez-moi ! Vous êtes bien Thomas Perrin ? Je ne sais pas si vous vous souvenez, mais je suis Aleksander Hellague…
Il s’était exprimé en un français parfait, car vingt ans d’apprentissage s’était glissé entre leur dernière rencontre, et il tendait désormais la main vers cette ancienne connaissance, ou est-ce encore un ami ?