Trépigner, piétiner, tourner en rond, grommeller, ronchonner, gratter sa barbe de trois jours, songer à la raser, ne pas avoir envie, oublier de manger.
Le quotidien d’un idiot comme Noah, incapable de penser à autre chose que le travail. Et en effet, s’il avait réellement fallu décrire ses pensées, cela se serait résumé uniquement à un champ lexical étendu, certes, mais seulement lié à ses enquêtes.
Du coup, valait mieux rester dans une narration sans pensées, uniquement l’externe, et découvrir un homme bourru, en train de se prendre tout seul la tête, littéralement et de façon figurée, pour une énigme qui lui pesait.
Fouillant dans des livres empruntés à la bibliothèque, consultant le net à la recherche de réponse, le vide lui répondait en écho à sa question.
Impossible de comprendre comment le coupable avait fait son coup, et il n’y avait rien de plus frustrant que cela.

Noah songea tout de même à une chose : il était clair que le coupable s’y était pris d’une façon méticuleuse, et qu’en prime, il usait d’une matière dans laquelle l’enquêteur n’excellait pas tant, mais connaissait. Seulement, ses connaissances restaient limitée, mais il avait une connaissance qu’il saurait utiliser : son cousin.
Cet espèce d’homme aussi outcast que lui, qui, adorait la science – ou du moins avait l’air – et parfois, un peu trop envenimer les débats sur la morale et ses couleurs.
Mais Noah ferait avec. Il savait que Archimedes saurait être d’une certaine aide. Même s’il y avait des chances qu’il lui demande un truc en échange.
Et là…Noah n’avait aucune idée de ce qu’il pourrait lui filer.
Enfin, il verrait.

Du coup, il arriva chez son cousin, espérant que les deux petits ne seraient pas là. Parler de meurtre devant des enfants, c’était terrible. Il préférait éviter.
Arrivé devant la porte, il lâcha :

- …Hey…T’as eut mon message ?

Message qu’il avait envoyé peu avant, mais dont il avait oublié de constater de la réponse, oubliant ainsi de vérifier si Archimedes acceptait bien de l’aider.

Noah n’avait aucune idée de ce que son cousin avait pu faire de sa nuit, mais il paraissait clair que celui-ci semblait ne pas avoir tant dormi que ça, pour la réaction qu’il eut. Déjà, l’angel ne compris pas la moitié de ce que Archimedes essayait d’exprimer, sinon quand il demanda l’heure. Enfin, il s’était fait tiré la cravate comme si c’était totalement logique.
Il compris juste qu’apparemment Noah ne devait pas envoyer de message avant…Non, pas avant maintenant, parce que vraiment, il était plus de quinze heures, cela aurait été étrange, non ?

Enfin, habitué au comportement de l’homme, Noah n’y fit pas attention. Et puis, il le comprenait un peu. Ce n’était pas rare, mais surtout le week-end, que Noah se réveille à des heures indues qui étaient loin d’appartenir à la nuit, parce qu’il avait justement travaillé toute la nuit sur une affaire.

- Je veux bien, merci.

Regardant autour de lui, Noah avait sûrement éveillé un bout de ses instincts de détective pour vérifier son hypothèse vis-à-vis de son cousin.
Mais après, il suffisait de juste regarder le dit cousin pour confirmer et comprendre que sa déduction devait être correcte.

- Tu as travaillé toute la nuit ?

Restait à obtenir l’affirmation.
Après, quelqu’un de normal aurait remballé ses éventuelles questions scientifiques à poser, pour respecter la vie de la personne en face de soi, mais Noah avait oublié ses manières à force d’être lui-même.
Il comptait bien interroger quand même Archimedes, bien qu’il nota de vérifier tout de même les données qu’il pourrait lui donner, on ne sait jamais, s’il disait des choses insensées sous la fatigue.

S’installant à la table, Noah attendit le café, qui ne tarda pas à venir. Noah se contenta d’un nuage de crème, ne désirant pas boire son café complètement noir, pour le coup.
Après avoir parlé, il vit son cousin s’étouffer à moitié, ce qui fit froncer les sourcils à l’angel. Bien qu’il fut habitué aux réactions étranges de l’homme, il en restait que ça restait surprenant.
Il se laissa à sourire un peu, quand Archimedes parla comme s’il avait besoin d’un avocat.

- Trop tard…

Mais il supposais que c’était bien ça, qu’il avait bien eut raison, et cela l’avait quand même fait sourire un peu.
Il regarda Archimedes se servir un bol de céréales, et songea à ces fois, où, par flemme de manger, Noah se faisait la même chose.
Quand il entendit le nombre d’heures de travail accumulé par son cousin, Noah ne recracha pas le café, à vrai dire, il songea plutôt à quelque chose comme « pas mal ».

- Tu as du bien t’amuser.

Noah savait que pour Archimedes, le travail devait être comme un amusement assez drôle. Il l’entendit lui poser une question, la bouche pleine et fronça les sourcils, peinant à comprendre ce que l’autre voulait lui dire.
Au final, il comprit tout de même et secoua la tête :

- Non, je ne viens pas demander de l’argent

Jamais ça ne serait le genre de Noah. Et même, limite demander de l’aide n’était pas son genre. Disons juste que ça dépendait avec qui…
Il grimaça quand son cousin le désigna comme un mouton blanc. Il savait que son cousin avait du mal avec son sens de la justice, et sa vision du bien et du mal, mais Noah faisait avec. Difficilement, mais il faisait avec.
Disons que parfois, c’était source de conflit pour lui, mais…

- Non je ne change pas là-dessus. Justement je viens pour ça. J’ai une affaire de meurtre, mais je n’arrive pas à comprendre comment le meurtrier s’y est pris. C’est trop scientifique pour moi.

Le fait que son cousin n’arrête pas de rire avait quelque chose de parfois vexant, mais il fallait croire que Noah s’était habitué, parce qu’il laissa faire.
Si Archimedes n’avait pas été une personne de sa connaissance, mais bel et bien un témoin important ou un expert important, il n’aurait pas pu supporter son comportement.
Il patienta, attendit que Archimedes fasse ses remarques désobligeantes, tout en buvant son café, calmement, patiemment.
Même si au fond de lui, il n’avait pas tant de temps devant lui.

- Ce qui me fait me le dire, c’est que le corps que j’ai retrouvé, est mort électrocuté. Enfin, son cœur indique qu’il est mort électrocuté. Mais pas le reste de son corps.

Noah lui donna les détails de l’autopsie, et de tout ce qu’il avait pu trouver pendant ses recherches. A son ton, on sentait que de fait, l’angel était une personne impliquée dans ses recherches, qui avait d’abord fait tout ce qui était son possible pour trouver une réponse, avant de se tourner vers un expert sûrement meilleur que lui.

Il fini par s’arrêter, avant de demander :

- Tu aurais une idée ?

Le laissant mouliner, Noah resta sur son siège, café en main, en train d’être fini.
Au moins, cela lui aura fait du bien.
Songeant à son affaire, il pensa aux autres pistes qu’il avait eu. Sur les suspects, les éventuels mobiles, les alibis, les proches.
Mais enfin, Archimedes le sortit de ses pensées, en lui parlant de quelque chose auquel Noah avait pensé, mais peu suffisamment pour réussir à vraiment s’y pencher.

Son cousin désirait quelque chose en échange, et ne pouvait être trompé avec des paroles comme quoi il aidait la justice. Chose qui ne surprit guère Noah. Il le connaissait bien pour savoir que son cousin avait tendance à être ainsi.

- Très bien, disons que je te dois quelque chose. Déjà je peux rayer ça, et l’argent. Je peux te donner quoi alors ?

Au lieu de se mouiller en proposant quelque chose, il préférait que ce soit Archimedes qui propose une idée.

- Sachant que ça doit rester légal et dans mes cordes.

Attendant la réponse de son cousin, Noah restait assis sur son siège, son café terminé.
Au fond, heureusement qu’il eut terminé son café, parce que bientôt, Archimedes lui donna sa réponse. Il voulait une carte de sortie de prison. Si Noah avait toujours eut son café en main, bien que celui-ci fut chaud jusqu’à sa fin, il l’aurait envoyé dans la tête de son cousin.
Quelque chose d’en somme illégal et qui pourrait lui apporter de nombreux problèmes. Noah observa le papier, le crayon. Gardant le silence, mais sentant sûrement son cœur battre plus fort, son esprit se mettre à bouillir. Preuve, il serra les poings, presque si fort, qu’il manqua de les faire blanchir.
Il était à deux doigts de se lever.
Jamais il ne pourrait faire un acte aussi criminel.

En fait, jamais il ne pourrait dépasser la loi. Même pour un simple excès de vitesse, et encore moins pour aider son cousin, qu’il appréciait pourtant énormément.
Il l’appréciait d’ailleurs assez pour sûrement inconsciemment faire comme s’il ne se doutait de rien quand son cousin commettait un acte illégal.

Et voilà qu’Archimedes jouait sur le temps, sur ses besoins. Que pensait-il ? Que Noah allait paniquer ? De nombreuses fois, des criminels avaient voulu négocier, et trouvant cela terrible, l’angel avait trouvé la plupart du temps des solutions pour faire autrement. Et ce, même si dans un sens, la négociation n’était pas un crime.

- Pour qui me prends-tu ?

Sa voix était froide. Attrapant le papier, il le déchira. Une fois, dans sa largeur.

- Je ne suis pas idiot. Si toi, tu ne peux pas m’aider, j’irais voir ailleurs.

Il déchira une seconde fois. Puis, une troisième. Sa mère, ou même, sa petite sœur, lui aurait demandé de remplir le même genre de papier, qu’il aurait eu la même réaction.

- Parce qu’imaginons. Je te donne cet accès, et je me fais attraper. Ca ne sera pas qu’un criminel qui ne sera pas attrapé. Et qui me dit que toi-même tu ne connaitras pas un meurtre ?

Le papier devenait des petits morceaux, qu’il lança comme des confettis, se fichant bien de qui viendrait nettoyer après lui.

- Alors, ce sera tout un tas, voire même beaucoup trop de criminels, qui seront en liberté. Et moi, j’en serais même devenu un.

Il se leva, devant se retenir de frapper son propre cousin pour la proposition qu’il venait de lui faire.

- Je t’ai demandé quelque chose de légal. Ce que tu viens de demander ne l’est pas. Tu as de la chance que je ne t’arrête pas.

Après, ça ne faisait pas que partie de la chance, puisque même si ça ressemblait à une tentative de corruption sur un policier, il venait d’en détruire la preuve, sous la rage. Il se maudit d’ailleurs pour cet acte irréfléchi, et était presque prêt à ramasser les morceaux.

Noah ne se sentait plus à sa place, maintenant que l’illégalité était entré en jeu. Bien évidemment, son côté blanc reprenait le dessus, et lui arrachait limite les tripes pour qu’il reste dans la voie de la loi et de la raison. Mais il fallu que son cousin ne lâche pas l’affaire. Pendant un instant, Noah se demandait si ses petits enfants, les petits « neveux » de Noah (bien qu’ils furent en vérité ses cousins) étaient éduqués de cette façon.
Seulement, son cousin l’attrapa au tournant.
Apparemment, il était prêt à obtenir son paiement, et ce, même si c’était une porte de sortie pour la prison, ce qui foutait clairement mal à l’aise Noah qui se sentait soudain inconfortable dans sa chaise.
Mais Archimedes était intelligent, sûrement plus intelligent que Noah, aussi, il sut toucher là où c’était juste.
Clore une affaire, avec des preuves, c’était plus difficile que tout, et il était clair qu’Archimedes n’avait rien d’un expert, et que Noah ne pourrait rien obtenir pour le nommer consultant – où du moins il craignait que ça n’empire les choses, le concernant -.

Pourtant, Noah ne voulait pas lâcher l’affaire. Il était hors de question qu’il garde dans son esprit, une maudite carte de prison.
Il écouta Archimedes s’exprimer néanmoins. Sur le fait qu’il ne tuerait personne, mais ça, Noah n’en savait rien, encore moins avec le petit b que son cousin venait de sortir.
Il entendit néanmoins le c, et Noah garda le silence, sachant très bien ce que Archimedes voulait dire par là.

L’observant, Noah se redressa dans son siège :

- Même si tu ne tues personne. Je ne veux pas. Je ne peux pas….Par exemple, garder les deux petits ?

D’accord, les dit petits étaient en âge de ne plus être gardés, mais pourquoi pas ?

- Ou….

Il réfléchissait à une autre alternative, mais n’en avait aucune idée, connaissant son cousin.

- Te nommer consultant sur l’affaire ? Ca ne me posera pas de problèmes ça.

Si on avait demandé à Noah pour quelle raison il ne s’était pas contenté d’aller voir ailleurs si l’autre y était…
Il aurait dit qu’il ne savait pas, qu’il n’en avait aucune idée, mais que c’était ainsi, et que c’était sûrement parce qu’il tenait malgré lui à son cousin, qu’il lui faisait plus confiance qu’à un autre expert.
Comme quoi, même en passant ses années à traquer pour la justice, Noah était restée une personne bien sensible.
Mais Noah savait que c’était sa dernière proposition. Si à cet instant, Archimedes préférait encore renouveler son intention d’idée illégale, l’angel s’arrêterait là.
Seulement, son cousin sembla s’acheter de la légalité, et paru négocier tout ce qui touchait autour de la consultation.

Réfléchissant un instant, Noah songea à la tête que les autres angels ou policiers pourraient faire s’ils croisaient Archimedes.
Après, si Noah fermait les yeux sur les quelques illégalités qu’il faisait tout pour ne pas prendre conscience, de son cousin…Ce ne serait pas le cas des autres policiers.
Mais ça, Noah ne le préciserait pas.
Prenant la main de son cousin, il hocha la tête :

- Très bien. Faisons ainsi, si tu le souhaites. Je préfère ça. Je m’arrangerais pour…Que tu sois consultant.

Au fond, Noah n’était pas persuadé que de faire de son cousin un consultant était si génial que ça, mais il n’avait pas vraiment le choix sur l’instant.
Il entendit ses questions, et y répondit rapidement. Pour le pacemaker il avait déjà vérifié, au cas où – il était déjà tombé sur ce genre de cas – et selon les scanners il n’avait rien de métallique dans le corps.
Par contre, il lui indiqua le lieu exact d’où il se trouvait, et l’état de décomposition que le dossier d’autopsie indiquait.

- Je sais, tu sais ? Je ne suis pas idiot, je sais comment marche la science. Je comptais répondre à tes questions dès l’instant où tu auras accepté.

Noah grommella un peu, n’appréciant pas qu’on puisse le penser aussi stupide.
Mais il avait suivi son cousin devant son ordinateur, donc il était prêt à tout lui dire. Il lui donna le plus d’informations possibles, qu’il jugeait nécessaire pour l’aider. Après, il ne lui dit pas tout, mais savoir que sa femme ne l’avait pas vu depuis une semaine parce qu’ils ne se voyaient plus trop, n’était pas quelque chose qui l’intéresserait.

- D’autres questions ?

Au moins, Archimedes vint à reconnaître que le meurtre devant lequel se retrouvait Noah n’était pas des plus faciles.
Mais il lui faisait assez confiance pour savoir qu’il lui trouverait quelque chose. Il hocha juste la tête, et se laissa à sourire un peu quand son cousin lui suggéra de prendre des affaires plus faciles.

- Mouais. Je prends ce qui vient, tant que je peux arrêter le criminel.

Et des cas faciles, il en faisait parfois à la pelle. Qui a volé l’orange ? L’abruti qui s’est fait prendre par la caméra de sécurité. Un trafic de drogue dans un coin où il a des indics bien placés ? C’est tout pour lui, si facilement.
A la mention du cœur, Noah réfléchit rapidement au rapport d’autopsie, et lâcha :

- Il était brûlé.

Il ne demanda pas pourquoi Archimedes avait demandé ça, du moment qu’il obtenait la réponse qui lui était nécessaire.