Parfois courir un peu avant les cours, c’était en somme une chose qui me plaisait, me défoulait, me permettait d’oublier, de ne pas penser, de… Je sentis un obstacle, manquait de tomber, m’emmêlait les pieds, perdit ma respiration.
Bien, ma course à pieds commençait bien, dis donc. Je soufflais, enlevant mes écouteurs, observant le reste du monde et son horizon.
J’aurais aimé me sentir bien, rien qu’une fois pendant plus d’une minute. Mais ce n’était un privilège accordé qu’à ceux qui ne portaient sur eux qu’un poids minime.

Enfin. Marchant, en jogging, transpirant un peu, profitant de la douceur du matin, je finissais par ne plus courir, consultant l’heure, me disant qu’il me restait encore un peu de temps avant mon cours. Parfait.
Je retournais dans un parc, et marchait doucement, avant de me poser, et de consulter mes mails, et tout ce qui allait avec.
J’allais sûrement rester six secondes sur le banc avant de repartir, mais quitte à faire…
Au bout de la cinquième seconde, une voix m’interpella et je me tournais vers celle-ci.

Tiens. Matthew. Ce n’était pas une présence désagréable à voir. Je lui souris, et mettait mon portable en mode verrou, enlevant mes écouteurs.

- Pas vraiment, de base je suis censé courir, mais je m’essaie à un nouveau sport : courir dans mon imagination. Tu veux le faire avec moi ? C’est assez amusant.

J’avais un sourire en coin, et l’observais :

- Et toi ? Tu cherches à capturer le soleil ? Ou tu flânes vraiment ?

S’il pouvait flâner réellement, il était chanceux. Moi je savais que je ne profitais jamais totalement de la vie. Peut-être parce que j’avais abandonné l’idée de l’apprécier. Hm. J’étais plutôt déprimant comme garçon, en fait.

- Au pire, tu veux courir avec moi ? Pour de vrai, je veux dire

Il était vrai que parcourir ses pensées avait un certain aspect défouloir. Mais moi, j’avais tendance à m’y perdre.
J’écoutais la réponse de mon ami, et reconnu que flâner aussi, c’était bien. C’était un plaisir que je ne pouvais pas tant m’offrir, vu que mon attention faisait que j’avais toujours besoin de faire tout un tas de choses sans m’arrêter.
Niveau repos, ce n’est pas ce qu’il y avait de mieux.

- Si j’ai cours. Mais pas maintenant. Bientôt. Je fatigue mon corps pour m’assurer que mon esprit suive.

Quelque chose du genre. A peu près similaire.

- Marcher me va aussi, honnêtement. On peut se promener main dans la main, dans les allées, à admirer ce magnifique début de soleil

Je restais sérieux un instant avant de pouffer, et de me relever du banc, rangeant tout mon matériel, m’étirant légèrement, et me mettant prêt à marcher :

- Tu as de la chance de ne rien avoir à faire aujourd’hui. C’est un loisir auquel je ne peux que très rarement prétendre.

Merci concentration pourrie. Enfin bref.

- Tu comptes faire quoi aujourd’hui, si tu as quartier libre ? Je sais que de mon côté ça risque d’être assez chargé, jusqu’à au moins la fin d’aprem, savoir pour toi me rend curieux.

J’aimais savoir ce que les gens qui pouvaient faire tout pour prendre leur temps, faisaient. J’avais connu ce délice aussi un jour. De nombreuses fois, je me posais à la plage avec Abigail, et on restait là, sans bouger, à faire bronzette.

- Oh, au fait, c’est toi qui décide où on va. Tant qu’on s’approche de la fac.

Je pense que le seul moment où je pourrais avoir la chance de ne rien faire arrivera quand, sous médicaments, je serais en vacances. Et ce n’était pas près d’arriver. Quoique si. La fin d’année approchait doucement.
Mais dans ces moment-là, quand je me forçais à prendre mes médicaments, j’étais presque totalement amorphe. Au moins, c’était efficace. Ou était-ce moi qui abusais de la dose ?
Sûrement les deux.

J’écoutais le programme de mon ami, et eut un sourire. A l’entendre, sa journée serait simple et sympathique. Je hochais la tête doucement.
A sa dernière réplique, faisant écho à la mienne j’eus un petit sourire.
La curiosité pouvait nous perdre, c’est vrai, mais normalement, cela devrait aller.
Quant aux cours…

- Ca dépend. Je veux dire, comme chaque personne, j’ai les cours qui me vont, et les cours qui me vont pas.

Je souriais doucement. Ce n’était pas toujours facile, mais j’arrivais à m’en sortir. Et puis, j’aimais de toute façon étudier.

- Là ça devrait aller. C’est plutôt plaisant. En plus demain j’ai mon cours préféré. Je ne trouve pas les cours « dur » en soit de toute façon. C’est ma façon de les gérer qui est plus difficile.

Niveau concentration, je voulais dire.

- Ca t’arrives, d’ailleurs, que les gens que tu forment, fassent n’importe quoi, au fait ?

Comme quoi, j’avais encore envie d’en savoir un peu plus.
[C’est tout naze. Je suis désolé]

J’avouais qu’avoir un cours qu’on aimait plus que les autres facilitaient la concentration, quand on en avait pas.
Je répondis d’ailleurs à sa question, et me disais qu’avec mes soucis, cela rendait ce fait assez ironique :

- J’aime beaucoup le cours de psychiatrie et neurosensoriel

Peut-être parce que cela me permettait de comprendre certaines choses qui pouvaient m’échapper. D’ailleurs, je me rendais compte que je m’étais bien arrangé pour qu’en cours, seul les professeurs soient réellement au courant de mes problèmes. Pas quelqu’un d’autre. Pas autre chose. Je n’avais pas envie d’avoir d’ennuis avec des élèves m’agaçant avec ça.
Je l’écoutais répondre à mes questions vis-à-vis de ses formations, et hochait la tête. Cela me semblait logique qu’à présent il y ait pas mal de moyens pour apprendre à contrôler son redio. Quand j’avais commencé à prendre de l’uredium, j’étais assez jeune…Bon c’était il n’y a pas si longtemps que ça, mais même.

- Ca évite la destruction d’endroits alors

Je souriais doucement. Avec mon redio, je ne pouvais certainement pas faire ça. C’était plutôt l’inverse.

- Mais ça va, avec la concurrence, t’as quand même du travail ? C’est vrai qu’avant pour trouver quelqu’un pour nous former c’était galère.

Je songeais au fait, que de base, je n’avais pas tant voulu aller me former, d’autant que mon âge était trop jeune, mais j’avais réussi à trouver la solution, et je ne m’étais pas fait attraper tout en apprenant des choses intéressantes.

- Moi avec tout ce qui arrive, je sens que je ne suis pas prêt de manquer de travail quand j’aurais fini mes études….

Au fond, je pouvais presque admirer Matthew pour sa patience. Avec mes difficultés de concentration, je ne savais même pas si moi-même je pouvais gérer des gens pour leur apprendre à se contrôler eux même. Ca demandait une sacré force mentale, je trouvais. Je posais doucement ma main sur l’épaule de Matt’ pour l’encourager du contact. Au moins, je savais qu’il faisait aussi de la photo, et que ça devait le changer un peu.

J’eus un sourire quand il m’encouragea, et consultait rapidement l’heure de mon téléphone, pour m’assurer que j’avais encore un peu de temps devant moi.

- J’espère que tes affaires continueront de marcher en tout cas. Au pire, si tu as besoin d’un modèle pour tes photos, je suis très bon pour rester en place pendant des heures.

C’était un pur sarcasme de ma part, et je souriais doucement.

- Même si je crois que toi, tu préfères plus les paysages, non ?

Je le comprenais. C’était joli.

- Oh ! Tu pourras me montrer tes futures photos ? J’aime bien celles que tu prends… J’ai peut-être pas de regard très artistique, mais j’aime.

Je le regardais en souriant toujours.

- Au fait, ta sœur va bien ?

Je crois que j’étais un peu parti dans plusieurs sujets différents, surtout par ma dernière réplique. Tant pis. De toute façon, je n’allais pas changer.

J’écoutais tout ce que Matthew me dit sur ses photos. Dans un sens c’était vraiment intéressant, même si de fait, je ne prenais pas de photos, donc que je n’avais aucune idée de ce qu’on ressentait à ce moment-là. Mais ça me faisait plaisir d’entendre mon ami m’en parler avec autant de passion. Je souriais doucement, et hochais la tête. Ca me rendait bien sûr curieux de voir ce dont il était capable de faire comme photos.
Je l’écoutais me donner des nouvelles de sa sœur, et eut un léger sourire amusé quand Matt’ parla d’acheter un chat. Pourquoi pas oui. J’espérais pour elle qu’elle trouverais un bon chat, et un bon emploi, où elle n’aurait pas de problèmes.
Il était parfois dommage, de constater que même avec un redio de guérison, je ne pourrais jamais aider toute la terre entière, guérir tout le monde, et aider ceux qui avaient les santés les plus faibles.
Cela aurait été d’ailleurs de prétentieux de ma part de prétendre l’inverse.

- Je vois… Je suis sûr qu’elle va finir par trouver un truc. En attendant pour les chats, je sais que y a des assocs’ qui en proposent gratuitement, me semble… Tu pourrais regarder de ce côté-là, si jamais.

Je souriais.

- Au pire, elle cherche dans quoi déjà ? Je pourrais peut-être voir si je connais des gens qui peuvent l’aider.

Je ne sais pas qui je pourrais connaître pour ça, mais comme j’étais assez « sociable » je m’entendais facilement avec un peu tout le monde, et quitte à faire, si je trouvais même des gens intéressants pendant mes combats… Parce que ce monde n’était pas forcément toujours des coups, de la triche, du biff, des fois il y avait du soutien. Des fois.

- Au fait, tu penses que je pourrais passer chez toi quand, du coup ?

Bon, il semblait que de fait, Matthew avait déjà fait toutes les procédures pour obtenir un chat. Mon offre tenait toujours, si jamais Karen avait des envies de plusieurs chats. Même s’il n’était pas sûr qu’ils puissent en avoir pleins.
Je savais les chats, indépendants et friands d’endroits étroits, mais j’imaginais qu’il y avait quand même des limites.
Je souriais quand Matthew me décrivit sa sœur. Au fond, elle me rappelait certains instants avec Abigail. Comme quand on lui offrait un cadeau, et qu’elle se mettait à hurler de plaisir. Mes parents avaient eu tendance à dire qu’elle leur cassait les oreilles, mais j’imaginais, que malgré eux, ils étaient contents.
Je fus surpris que Matthew trouve « super cool » que je m’inquiète pour sa sœur, et haussait les épaules. Pour moi, ça me semblait normal. J’appréciais Matthew, j’imaginais qu’il était logique que j’apprécie son entourage, d’autant que sa sœur ne semblait pas méchante. Bien au contraire.

- Oh tu sais, ça me semble normal.

J’écoutais Matthew me dire qu’il serait disponible ce week-end. Bien, il me semblait qu’à part un combat rapide le soir, je n’aurais rien à faire non plus. Je fus amusé de l’entendre me dire qu’il avait parlé de moi à sa sœur. Sans en paraître surpris. Abigail connaissait tous mes amis, de son vivant.

- Je partageais tout avec ma sœur. Même si…Tu parlais d’elle et de ce qui s’est passé à la tienne, j’imagine que je ne t’en voudrais pas, en vérité.

Je souriais doucement, même si une pointe de tristesse subsistait sur mon visage. Je ne pouvais pas la masquer.

- Mais c’est amusant que Karen ait vraiment envie de me voir. Ca me rend curieux de la rencontrer aussi. Elle a des sucreries qu’elle préfère ? Je pourrais ramener des pâtisseries…

Pour ce qu'il m'avais raconté, j'imaginais que Karen devait en effet prendre plaisir à rencontrer des nouvelles personnes. En fait, j'étais presque surpris de ne pas l'avoir vu avant, mais était content que ça pouvais bientôt se faire au fond. Je crois, que malgré ce que j'étais, et malgré ce que je pensais, j'étais aussi content, quand je rencontrais de nouvelles personnes. C'était toujours plus agréable, en plus d'entretenir les personnes déjà rencontrées. Enfin, j'imaginais.

- J'espère qu'on pourra être amis alors. Mais si je m'entend avec le frère, pourquoi ne m'entendrais-je pas avec la soeur ?

C'est vrai ça. Ca sera sûrement assez facile de m'entendre avec elle. Ou tout du moins j'imaginais. Je savais que Matt' me parlais d'elle de temps en temps, donc je pouvais me faire une image d'à quoi elle pourrais alors ressembler mentalement, et sur quels points je pourrais avoir au minimum un peu d'affinité avec elle.
Déjà de sûr, je m'entendais avec les chats, ça serait un bon point. Je n'avais pas d'animal, mais quand j'étais jeune et qu'Abigail était encore là, on avait un chat nommé Rosbif - Abigail avait des goûts douteux pour les noms qu'elle donnait aux animaux, mais nos parents nous avaient laissé faire - et il semblait bien m'apprécier à mon souvenir.

Enfin...J'entendis Matthew me dire que je pourrais toujours ramener n'importe quoi au caramel ou à la vanille, et j'esquissais un grand sourire. Sûrement parce que j'adorais la vanille moi même. Beaucoup moins le caramel. A vrai dire, je n'aimais même pas ça, et bien que j'adorais les îles flottantes, j'avais toujours beaucoup de mal à manger à la fin. Entre autre.

- Je lui prendrais un truc au caramel, histoire d'éviter de lui manger ce que je comptais lui donner, en chemin.

Je riais un peu. Je songeais déjà à ce que je pourrais acheter. C'était assez facile à trouver au moins. Mais je sentais que je me prendrais quand même un truc à la vanille parce que c'était beaucoup trop bon. Et puis, je n'avais pas trop à m'en faire pour mon poids, mon métabolisme semblait faire avec.

- Elle est du genre gourmande alors ? Et toi, du coup ? C'est quoi ton péché mignon ? La même chose ?

Personnellement, je ne jurais que par la vanille. Et la pistache, aussi. Mais niveau arôme sucré, c'était surtout ces deux là. Sûrement parce que parfois le chocolat était trop, le caramel, ce n'était pas bon, et je n'aimais pas ce qui avait le goût du café...

Un instant, même si ce n'était pas si agréable que ça d'y repenser, je me demandais si, quand j'étais avec Abigail, les gens m'appréciaient autant qu'ils appréciaient Abigail. Sauf qu'à l'époque où je trainais avec ma soeur, j'étais encore jeune. Je supposais même ne pas avoir la maturité que j'avais aujourd'hui. Alors ça ne devait pas être si agréable que ça. Peut-être que j'étais même un sacré pot de colle et que je n'en avais pas conscience. Mais je préférais éviter d'y penser. Je savais parfaitement où tout cela pouvait me mener, et au fond, je n'en avais sincèrement aucune envie. D'autant que nous arrivions bientôt non loin de là où je devais aller, c'est à dire, la fac de médecine.
Je devais rester concentrer, en prime, sur ce que me disais Matt. Histoire de pas trop dériver. D'autant qu'il me sembla ne pas avoir tout écouté, ce qui manqua de me faire culpabiliser. Mais je pensais avoir capté l'essentiel, ce qui était au fond, une bonne chose.

Je souriais en écoutant Matthew me décrire sa soeur comme quelqu'un de gourmande, en effet. Malgré moi, je repensais aux moments où Abi mangeait plus qu'il ne le fallait, plus que son appétit le demandait, et je repensais aux remarque de mes parents, et je repensais... Je pensais trop. Bon sang. Parfois, j'aurais aimé m'éclater la tête contre un mur pour arrêter de penser. Mais j'imaginais que ça aussi, ça faisait partie de ma malédiction.
Je retins simplement ce que me disais mon ami, qu'il aimait les choses à base de fruit et le chocolat. J'imaginais qu'existait alors des pâtisseries mélangeant les deux. Il me semblait même en avoir déjà croisé. Comme ça, cela mélangerait tout ce qu'il aimerait, et je ne pourrais que tomber bien.
Je me tournais vers lui, avec un sourire :

- Parfait alors.

Je l'observais, et regardais autour de nous. Finalement, je n'avais pas tant couru que ça, mais ça n'était pas un drame. Je n'étais pas obligé de m'épuiser à courir, si je croisais un ami. Quoique.

- Je ramènerais pleins de bonnes choses, en ce cas. Je suis content d'être tombé sur toi.

En vrai, c'était toujours un plaisir de parler avec lui. Matthew était un véritable ami, qui en prime, avait... Une tendance à me "calmer". Je n'aurais pas vraiment su expliquer comment tout ceci fonctionnait, mais disons, que sa présence avait tendance à me détendre, plus que me stresser, m'exciter, ou autre chose. Et au fond, un ami calme, c'était bien. Surtout avec des problèmes de concentration que je pouvais avoir.

- Je vais devoir te laisser, les cours, tout ça... Mais passe une bonne journée, en tout cas. Et passe le bonjour à Karen.J'espère pour toi qu'elle saura se tenir, d'ici ce week-end.

Je savais que les gens gourmands avaient tendance à toujours attendre avec impatience la nourriture qu'on comptait leur offrir. Je souriais, avançant de mon côté vers là où je devais aller. On voyait la faculté de médecine depuis là où nous étions.

- A plus !

[Du coup j'ai conclu, donc à toi de voir si cela passe pour toi =)]